Mauritanie

Celui qui sait le plus, doute le plus.

Octobre 1997 => 2 semaines

Jeune Fille / Atar Fillette / Tawaz Après la traversée du Sahara Occidental, sur le territoire marocain, au travers d'un sol caillouteux parsemé de dunes et de monticules de pierre déchiquetés par les vents de sable abrasif, Nouadhibou est la bienvenue. Arrivé peu après la tombée de la nuit, fatigué par des formalités excessivement longues à la frontière, la première soirée se bornera à une douche et un repas, suivis d'une longue nuit de sommeil salvatrice. Le lendemain, il faut encore effectuer 2 démarches administratives en 2 endroits différents: se faire apposer le tampon d'entrée sur le passeport et effectuer une déclaration des devises transportées.
Nouadhibou est propre et les étals bien achalandés. On s'y sent très bien surtout que ses habitants ne nous traitent pas en étrangers, ils réagissent comme si l'on avait toujours été là. C'est suffisamment rare pour être surprenant.
Avec Pieter, un ami hollandais rencontré au Maroc, on part pour le Cap Blanc, supposé être une ravissante réserve naturelle. Celui-ci se situe à 15 km de Nouadhibou mais le chauffeur de taxi semble n'en avoir jamais entendu parler, du moins sous cette appellation, et l'on peine à lui expliciter notre destination. J'en oublierais ma bouteille d'eau dans la voiture. Il nous dépose en face d'un immense complexe industriel, 7 km plus loin. A pied, après avoir contourné l'usine, une piste apparaît que l'on suivra sur les 8 km restant. Le Cap Blanc porte mal son nom, il faudrait le renommer "Cap Rouge" car sous l'action des vents dominant, emportant des poussières du minerai de fer chargé en continu dans d'immenses bateaux attendant à la queue leu leu leur tour, une épaisse couche rougeâtre recouvre l'ensemble du cap. Des amas de détritus jonchent également cette supposée réserve naturelle. Arrivé en son extrémité, un homme sorti de nulle part et entouré d'une nuée de mouches agressives, vint à notre rencontre afin de nous délester d'un supposé droit d'entrée. A son approche, elles vinrent bourdonner autour de nous mais fort heureusement rejoignirent leur maître dés qu'il se fut éloigné. Pas de trace de la colonie de phoques moines censée résider ici mais la promenade fut néanmoins agréable. Le retour, par contre, se révéla exténuant. Sans eau et sous un vent qui s'amplifiait, transformant le sable en d'innombrables petites aiguilles, c'est la gorge pâteuse que l'on regagna la ville où l'on but plus d'un litre d'eau chacun, d'une seule traite.
Le soir, me promenant sur le port, je fus invité à dîner par un Sénégalais venant en ces lieux pour pêcher car ce sont parmi les eaux les plus poissonneuses du monde. Il prépara un excellent Thièboudienne, plat national sénégalais, constitué de riz et de poisson.
Pour quitter Nouadhibou, très peu de possibilités: via le train en direction de Zouérat et de ses immenses mines de fer ou si l'on possède un véhicule, en suivant la côte, en compagnie d'un guide pour déjouer les pièges du désert. On prit le train mais seulement jusqu'à Choum, ville située à proximité d'Atar. Cet unique train mauritanien est le plus long du monde. Il s'étire sur 3 km mais ne compte qu'un wagon délabré pour les passagers, sans vitre ni éclairage. On embarquait à 15h et arrivait à Choum vers 2h du matin, couvert de sable des pieds à la tête. Les paysages furent magnifique et l'on eut tout le loisir de les observer mais ma présence faillit générer des problèmes. Etant français, une discussion passionnée s'engagea entre quelques Mauritaniens afin de déterminer qui avait aidé les Français pendant la guerre. Différentes ethnies étant présentes et les Français ayant alors joué sur tous les tableaux, personne ne put tomber d'accord et les esprits s'échauffèrent, tout le wagon se mêlant maintenant à la discussion. C'est un Sénégalais, assis à coté de moi, qui me traduisit les débats, m'affirmant que j'avais devant mes yeux, le parfait exemple du début possible d'une guerre ethnique en Afrique.
Arrivé à Choum, tous les chauffeurs de taxi veulent nous accaparer. Comme il n'y a que peu de monde, une seule voiture suffira et c'est la guerre pour rafler les clients mais pas sur les prix. Une fois la voiture du vainqueur chargée, il lui faut alors faire le plein d'essence puis faire le tour du village afin de ramasser toutes les petites commissions à destination d'Atar. Le départ effectif n'eut lieu que 2h plus tard et le soleil brillait déjà en arrivant à destination.
Jolie Cabane / Tawaz Outre d'eau / Tawaz La tenancière du petit hôtel dans lequel on aboutit, nous offre un thé à notre arrivée mais il nous sera facturé plus tard. Il y fait effroyablement chaud mais on y est tranquille. Atar, petite ville perdue dans le désert, accueille une caserne de militaires français dont les occupants forment les soldats mauritaniens. Peu de routes goudronnées et elles sont toutes en très mauvais état, sauf celle menant à l'aéroport, refaite pour la visite du président français Jacques Chirac. A cette occasion, tous les véhicules japonais comme les pick-up yamaha qui ont maintenant la préférence des Mauritaniens, ont été remisés pour ne laisser circuler en ville que les vieilles 504 délabrées. Pas grand chose à faire ici. Au marché, il faut chasser les mouches pour entr'apercevoir la viande située dessous. Tout semble appartenir aux Maures Blancs, les noirs effectuant les travaux physiques. A proximité d'Atar, se trouvent les célèbres oasis de Chinguetti et Ouadane, autrefois rayonnantes de par leur culture et leur richesse mais s'ensablant aujourd'hui. On désire s'y rendre mais le conducteur du seul taxi disponible, habitué aux groupes nantis arrivant directement de France par vols charters, nous demande un prix exorbitant. On déniche un maraîcher, venu vendre ses légumes et repartant à Chinguetti, qui accepte de nous emmener pour une somme modique. En sortant de la ville, des policiers nous arrêtent et nous interdisent de poursuivre dans ce véhicule car il n'est pas autorisé à transporter des touristes et une plainte à été déposée à ce sujet. En fait, on aperçoit au loin, le chauffeur de taxi rejeté, observant la scène. De retour à l'hôtel, celui-ci vient nous relancer et Pieter excédé le traitera de "Cochon" en français, terme bien choisi vu les rapports entretenus par les musulmans avec cet animal. La rixe fut évitée de justesse. En Asie, les gens se mettent en 4 pour trouver des solutions mais ici, les Maures Blancs te sachant coincé, se bornent à attendre quelques jours que tu cèdes. En tout cas, lui, il pourrait attendre toute l'éternité. Le patron de l'hôtel étant rentré, il nous proposa une petite excursion de 2 jours dans un petit village, dénommé Tawaz. Dans celui-ci, il n'y a ni électricité, ni groupe électrogène, ni chien, c'est le calme parfait. Les discussions autour d'un feu le soir n'y sont pas encore supplantées par la télévision. Petit village au cœur de maigres palmeraies, l'eau y est remontée de puits profonds. A cette fin, 2 puits sont creusés côte à côte, l'un s'arrêtant au-dessus de l'eau et ne servant qu'à supporter la motopompe aspirant l'eau dans le puits le jouxtant. Une pompe ne pouvant aspirer directement l'eau sur une hauteur de plus de 7m. La plupart des enfants sont craintifs mais pas tous et toujours curieux. Un petit abri constitué à partir de vieux bidons d'huiles trône dans le village. On passe la soirée sur un toit à la belle étoile, savourant la paix de l'endroit.
Après Tawaz, on repasse rapidement par Atar puis on poursuit vers Nouakchott à travers le désert, à bord d'un taxi dont le conducteur semble se croire dans un rallye raid. Vu l'état du véhicule, il lui faut souvent s'arrêter pour resserrer les roues et l'on est victime de 2 crevaisons. Peu après avoir regagné une route en construction, on s'arrête pour manger: thé et chameau grillé au menu. Ici, les jouets pour les enfants, il leur faut les construire eux même. La voiture n'aimant visiblement pas la vitesse, le moteur coule une bielle 5 km après être reparti et il nous faut attendre plus d'une heure qu'un pick-up nous prenne. Une jeune française, Rachel, fraîchement débarquée à Atar, est également présente. Elle a décroché une bourse et vient écrire une thèse en Afrique. Vu le retard, on arrive à destination au milieu de la nuit et elle nous invite à passer la nuit chez son contact, prénommé Yuddhi, à Nouakchott, secrétaire général de l'université. Il accepte de nous héberger et disposant d'un appartement pour les invités étrangers, nous le propose gracieusement. Appart climatisé et spacieux, on s'y sent comme des coqs en pâte après les rigueurs endurées. Merci à lui et à Rachel. Yuddhi est un fin connaisseur en vins et fromages français, d'ailleurs il en possède et nous en fit profiter au cours du déjeuner le lendemain.
Réparation des Filets / Nouakchott Jouet / Desert Nouakchott n'est ni jolie ni accueillante mais la plage et ses pêcheurs, situés à 3km, est pleine de vie et pittoresque. En ville, je croise un Français ayant perdu son passeport et son argent, en tentant de rejoindre le Maroc. C'est interdit, seul le passage dans le sens Maroc-Mauritanie étant autorisé. Son guide s'est certainment joué de lui. En tout cas, il est parvenu à rejoindre Nouakchott après quelques difficultés, n'obtenant aucune aide à Nouadhibou, mais l'ambassade refusa de lui porter assistance, plus encline à recevoir des investisseurs potentiels. Il lui fallut pleurer pour qu'une infirmière accepte de le laisser téléphoner en France afin de demander de l'aide à sa famille. Elle en profita pour le soigner car sans argent, dépérissant, il s'était vu rongé par des staphylocoques dorés.
Pour se rendre au Sénégal depuis la capitale mauritanienne, rien de plus facile. La route est excellente et en moins de 3h on arrive à Rosso. Cette ville borde la frontière naturelle entre les 2 pays qu'est le fleuve Sénégal. Les formalités sont aisées et on embarque à bord d'une pirogue. Sénégal me voilà.

Retour Index